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Campagne du Soldat Léonard MOURET

21éme Régiment d'Infanterie Colonial

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Léonard MOURET est exempté en 1908 pour faiblesse générale. Il est classé bon pour le service en 1914.

Il est mobilisé le 20 février 1915 et rejoint le 100ème Régiment d'Infanterie de Tulle.


Du 19 octobre 1914 au 25 mars 1915, le régiment occupait le secteur de Thuisy. Tout était réuni pour permettre, par le seul fait de l'occupation du terrain, une véritable instruction de la troupe et des cadres. Secteur calme, terrain plat, semé de boqueteaux, acharnement médiocre l'un contre l'autre, organisation embryonnaire, peu d'artillerie des deux côtés.

Après quelques jours consacrés à l'amélioration des gourbis, le régiment exécute un travail complet d'organisation pour mettre en état de défense la position.

Du 25 au 29 mars, le régiment cantonne au sud de Châlons.



Le Bois d'Ailly.


Le 29 mars, le régiment quitte la région de Vitry-le-François pour se rendre dans la Meuse, il cantonne successivement à Pagny-sur-Meuse, Avrainville et Griscourt où, le 5 avril, il est alerté, puis dirigé sur Marney.

Dans les journées des 6, 7 et 8 avril 1915, les bombardements causent quelques pertes. Dans la nuit du 8 au 9, un bataillon gagne 200 mètres de terrain, formant ainsi saillant dans la ligne française. Le 9 avril, attaque infructueuse sur les organisations allemandes. Neuf tués et 56 blessés.

Le 11 avril 1915 le régiment est relevé. Du 12 au 24 avril, occupation de tranchées, séjour en cantonnement, rien de remarquable. Mais du 24 au 27, de durs combats vont se dérouler.

Le 24 avril, à 8h30, le 2ème bataillon attaque. En tête, la 8ème compagnie se porte sur la partie des tranchées allemandes du bois d'Ailly, au nord-ouest du Grand-Layon. La compagnie toute entière, munie de sacs à terre et de grenades, a réussi à prendre pied dans la tranchée adverse où pendant trois jours et deux nuits elle résiste à de nombreuses contre-attaques.

Le 3ème bataillon, alerté à 4h00 part pour sa mission qui est : « Partir de la tranchée 1-2, se porter vers l'est à l'abri de la tranchée Grise, dépasser la droite de cette compagnie, puis s'emparer du restant de la tranchée grise en se rabattant jusqu'au Lanterneau.» La base de départ, non évacuée par la garnison, ne permet que l'entrée en ligne d'une compagnie à la fois. Le terrain boisé et bouleversé par les obus masque aux vues l'objectif. Après une préparation de 15 minutes, la 12ème compagnie débouche et en quelques instants le commandant de compagnie, 5 sous-officiers, 5 caporaux et 52 sont couchés à terre.

La compagnie se disperse dans les boyaux adjacents et dans les mêmes mauvaises conditions, elle essaye de progresser. Bientôt la perte de 2 officiers dont le commandant de compagnie, de 6 sous-officiers, 7 caporaux et 27 hommes, la clouent au sol.

Le soir, l'attaque est reprise. A 17h00, la 10ème compagnie, sans préparation d'artillerie, essaye de surprendre l'ennemi. On marche en rampant, la nuit arrive, la direction est perdue, les sections obliquent. La compagnie a perdu 3 sous-officiers, 2 caporaux, 24 hommes.

La journée a été rude, les trois compagnies les plus éprouvées vont se réformer à la Maison Blanche. Le 26, à 12h30, l'attaque se déclenche sur la tranchée Grise et le crochet du bois d'Ailly. Certaines unités sont immédiatement arrêtées, mais trois sections parviennent jusqu'aux tranchées allemandes, tuant une centaine de Boches et faisant 40 prisonniers. Vigoureusement contre-attaquées, après 25 minutes de lutte opiniâtre, ces unités doivent se replier.

Pour le 2ème bataillon, les pertes ont été ce jour-là de 150 hommes et 5 officiers tués, blessés ou disparus. Il ne reste plus, pour ainsi dire, de sous-officiers.

En somme, du 24 au 30, le régiment a perdu 86 tués dont 4 officiers, 330 blessés dont 7 officiers, 56 disparus dont 2 officiers.

Il a droit au repos, tel qu'on le comprend à la guerre. Aussi est-il transporté dans la région Ancemont-Sommedieu, où vraiment la vie est si calme qu'on ne s'y croirait presque plus au combat. Il y reste jusqu'au 26 mai, tantôt en ligne dans le bois Loclont, tantôt en rafraîchissement à Sommedieu. Le 27, il débarque vers Toul.

Pendant quelques jours, le régiment se repose dans la région de Rozières-en-Haye et Saiserais, puis va prendre position : 1er bataillon, au bois Le Prêtre, 2ème et le 3ème ainsi que l'état-major, à Liverdun.

En juin, peu de pertes. Le mois de juillet va être plus animé.

Le 14 juillet, le 1er bataillon lance à l'attaque, à Blanleuil, deux compagnies, qui, malgré les pertes subies, arrivent à gagner à l'ennemi une quarantaine de mètres. Les positions sont organisées, mais avec du gros calibre et des minenwerfer l'ennemi bombarde sérieusement et sans combat, en quelques jours, les pertes sont fortes.

Du 15 au 19 juillet 1915, en effet, le régiment, continuant son travail d'organisation, perd 22 tués, 86 blessés et 1 disparu.

Le 22, le régiment se porte à l'attaque : six compagnies en première ligne, cinq compagnies en soutien, la dernière en réserve. A 17h40, après une préparation d'artillerie lourde et de moyen calibre, les compagnies d'assaut essaient de sortir de leurs tranchées. Mais toutes nos tentatives sont arrêtées par des feux de mousqueterie et de mitrailleuses qui garnissent la tranchée ennemie.

Le tir de notre artillerie n'a que très imparfaitement endommagé la tranchée de première ligne ennemie. Sur certains points du front même, les Allemands sont sortis de leurs tranchées pour contre-attaquer. Une lutte de grenades et de pétards s'en est suivie et, de part et d'autre, on est rentré dans les tranchées. La lutte avait été opiniâtre ; nous perdons en ce jour 10 tués et 57 blessés.

Après trois journées de demi-calme, le 26 juillet 1915, vers 8h00 du matin, l'ennemi, après avoir démoli par un feu violent de minenwerfer et de bombes un poste d'écoute du au saillant, réussit à prendre pied dans ce petit poste, mais arrêté par le feu de nos mitrailleuses et de notre infanterie et par nos grenades, il ne peut en déboucher et ne peut progresser sur le saillant. A 10h00, on attaque le poste d'écoute par le boyau faisant communiquer ce poste avec le saillant. Mais l'ennemi a eu le temps de se fortifier. L'attaque. assaillie par un jet de bombes et de grenades, ne peut réussir. La 3ème compagnie a plusieurs blessés et 2 tués. A 17h10, l'attaque est renouvelée. Malgré l'appui de huit obusiers Celerier et de deux mortiers de 15, cette attaque vient échouer devant le poste d'écoute que les Allemands ont transformé en un véritable bastion blindé, au moyen de rails, de sacs à terre, etc. Pertes : 8 tués, 57 blessés. Une seule compagnie, la 3ème, avait, au cours de ces deux attaques, perdu 53 hommes

Le 27, l'ordre est donné de reprendre, dans la nuit, le poste d'écoute. A 2h15, l'attaque est menée par trois vagues successives fortes chacune d'une section environ et débouchant de la partie gauche du saillant. Cette attaque, accueillie par un violent feu d'infanterie et de mitrailleuse, ainsi que par un jet de flammes produit par un flamenwerfer, ne peut réussir. La compagnie se reforme dans la tranchée. Pertes : 12 tués, 25 blessés.

Le 28, une attaque ennemie est facilement repoussée. Dans la nuit du 1er au 2 août, les Allemands avaient réussi à s'emparer d'une portion de tranchée connue sous le nom de saillant. Le 3ème bataillon reçoit l'ordre de reprendre le terrain perdu ; il réussit à progresser sur une cinquantaine de mètres et réorganise le terrain reconquis.

Le 3 août, nouvelle progression à 3h45 du matin, le même jour, à 17h45, l'attaque est reprise, mais soumise à un feu violent de mitrailleuses que notre artillerie n'a pu réussir à détruire, nos unités ne peuvent progresser, tout s'arrête devant les barrages de sacs à terre.

Le combat se poursuit par un échange de grenades de part et d'autre. Jusqu'au 26, le régiment tient le secteur, à l'organisation duquel il travaille dur. Les deux jours suivants, il fait mouvement pour se transporter sur la région Ippécourt - Saint-André, où il cantonne jusqu'au 8 septembre.



Septembre 1915.


Le 9 septembre 1915, le régiment quitte ses emplacements et est dirigé sur Florent. Il occupe, dans la journée du 12, le sous-secteur de la Harazée. Relevé il part le 18 pour Ippécourt-Saint-André et de là, le 21, pour Saint-Thomas. La grande offensive du 25 septembre se prépare. Le 100ème prend ses emplacements de combat.

Les troupes s'ébranlent. Elles sont reçues par un feu d'enfer. Après une progression remarquable jusqu'à la troisième tranchée allemande sur certains points, les unités, réduites à quarante combattants, privées des trois quarts de leurs chefs, sont obligées de reculer jusqu'à la parallèle de départ. Le bois de La Grurie nous a coûté cher : 6 officiers tués, dont le commandant le régiment, 10 officiers blessés et 6 disparus, et pour la troupe 50 tués, 281 blessés et 109 disparus.

Le régiment en a terminé avec l'attaque du 25. Après quelques déplacements, soit à pied, soit en convois automobiles, le 100ème cantonne dans la région de Toul, Liverdun, Gerbéviller, Fraimbois, Lunéville et, en travaux, manœuvres et repos, il atteint 1916 dans le recteur de Donjevin-Vého.



Le 17 novembre 1915, Léonard MOURET passe au 21ème Régiment d'Infanterie Colonial.



Relevé dans la nuit du 29 octobre, le régiment passe en réserve à Maffrecourt, puis reprend les lignes le 6 novembre, ayant reçu un premier renfort de 101 hommes. Encore une période de réserve et une période en ligne, puis le 21ème est ramené vers l'arrière, quittant, pour la seconde fois et pour n' y plus revenir, cette région de Massiges où sont tombés tant des siens.

Le régiment quitte Maffrecourt le 30 novembre en camions et est amené à SaintMard-sur-le-Mont et Contault-le-Maupas où commence sa réorganisation : 4 détachements de renfort sont incorporés.

Le 17, embarquement pour Meaux. Le régiment cantonne aux abords immédiats de Meaux, dans les villages de Chambry, Penchard, Vareddes, puis Crégy et Poincy. Pendant un mois ce sera le vrai repos. Huit nouveaux détachements arrivent, les effectifs des compagnies reconstituées sont presque au complet. Le régiment a repris une nouvelle vigueur. Deux semaines d'instruction intensive et de dures manœuvres achèveront sa mise au point.

Du 6 au 12 janvier 1916, mouvement par voie de terre. Itinéraire : Dammartin-en-Goële, Luzarches, Neuilly-en-Thelle, Abbecourt et Froissereux pour gagner le camp de Crèvecœur-le-Grand. A l'arrivée le régiment occupe les cantonnements de Luchy, Auchy-la-Montagne et Maulers.

Jusqu'à la fin de janvier l'instruction se poursuit intensive sur les plateaux balayés d'un vent glacial. Les exercices de bataillon, de régiment et de division se succèdent, redonnant aux diverses unités du corps d'armée toute leur valeur combative.

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La période de préparation.


Le régiment quitte le camp de Crèvecœur-le-Grand le 28 janvier 1916. Son mouvement, commencé par voie de terre, le porte à Fransures, Rogy et Lawarde-Mauger d'où, alerté, il est enlevé en camions et conduit à Caix-en-Santerre. Il y arrive le 30 et reste en réserve derrière le 7ème R. I. C. qui réussit de brillantes contre-attaques au bois de la Vierge et au bois de la Vache.

Le 15 février, le régiment prend, au sud de la Somme, le sous-secteur de Cappy. La relève, dans les boyaux emplis d'une boue épaisse et gluante où l'on enfonce jusqu'à la ceinture, dure 2 jours et 3 nuits. Dans le boyau Lanus, pris d'enfilade par un canon-revolver, plusieurs hommes meurent enlisés.

Le 17 une attaque allemande sur la tranchée de première ligne (bois de la Vache), elle aussi emplie de boue et sans abris utilisables, est victorieusement, repoussée par le 1er bataillon.

Jusque fin avril, le régiment prendra une large part à l'occupation des positions reprises aux Allemands vers Frise. L'hiver est impitoyable, il neige sans interruption. le froid est glacial, le terrain labouré par les obus n'est plus qu'un lac fangeux. Des travaux importants de réfection se poursuivent sans arrêt, cependant que l'ennemi très agressif, nous oblige à une vigilance de tous les instants, sans oser toutefois passer à l'attaque, étant, par ailleurs, trop absorbé par Verdun qui résiste victorieusement.

les pertes journalières nous ont coûté plus de 400 hommes hors de combat, le régiment se prépare à l'offensive franco-britannique.

Arrivé le 5 mai à Hangard et Demuin, il y incorpore et répartit d'importants renforts venus de l'intérieur (600 hommes, qui font plus que combler les vides). Le 21ème maintenant au complet, est prêt à reprendre la lutte.

Du 2 au 15 juin, il tient les lignes à Foucaucourt. Le 16 juin, le régiment vient prendre place à son créneau d'attaque, dans la subdivision de Dompierre, face à ce village qui sera son premier objectif. L'offensive, dont l'importance a dû être diminuée en raison de l'usure produite par la bataille de Verdun, visera à prendre pied sur le plateau de Flaucourt, en vue d'empêcher l'artillerie ennemie de cette région d'agir au nord de la Somme. Elle ne devra pas dépasser l'objectif limité qui lui est assigné.

Le 26 juin, la préparation d'artillerie commence, formidable. Elle se poursuivra sans arrêt jusqu'au 1er juillet, pilonnant le terrain, écrasant les défenses accessoires où elle ouvrira de larges brèches. Pendant ce temps l'infanterie prépare son terrain d'attaque et aménage les tranchées en vue de leur franchissement.

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L'offensive.


Le 1er juillet, à 5h00, les troupes sont en place. La matinée est brumeuse, le temps lourd. De 7h00 à 7h30 l'artillerie exécute un simulacre de préparation immédiate d'attaque. De 9h00 à 9h30, la préparation effective se fait sur notre front. Nos mines explosent. A 9h30, les vagues s'élancent dans un ordre parfait, franchissent le « no man's land » et atteignent les premières lignes ennemies, profondément bouleversées. A 9h45, la première vague occupe la tranchée Heinrich et Dompierre nivelé par nos canons. Pendant que la troisième vague nettoie le village, les unités d'assaut, toujours en ordre, marchent du même élan sur Becquincourt, le Moulin et Bussus, objectifs de fin de journée, qui sont atteints vers 11h00, presque sans pertes. Les réserves du régiment serrent dans nos tranchées de départ. 400 prisonniers, 6 mitrailleuses, 1 groupe électrogène et un important matériel restent entre nos mains.

A 15h45, l'ordre arrive d'attaquer la tranchée Brunehilde, deuxième position allemande devant laquelle nos reconnaissances ont constaté la présence d'épais réseaux non détruits et dont nous sépare un glacis de 600 mètres sans défilements ni abris. Après une préparation d'artillerie de 20 minutes qui, de 17h40 à 18h00, a pilonné la position, l'infanterie s'élance. La tranchée Brunehilde est enlevée sur une longueur de 150 mètres.

Menée par le terre-plein, l'attaque de droite se trouve prise sous le feu terrible des mitrailleuses d'Assevillers et ne peut atteindre la tranchée.

Le 2, au petit jour, sans nouvelle préparation d'artillerie (qui eut entraîné l'évacuation des portions de tranchées si brillamment conquises et si âprement conservées), l'attaque est reprise par une progression méthodique, menée à la grenade, avec l'appui des canons. Nous nous rendons maîtres de toute la tranchée et nous nous y maintenons, repoussant une violente contre-attaque partie de la tranchée de doublement. La lutte pour la conquête de celle-ci commence aussitôt, bientôt transformée en un sanglant corps à corps à la suite du déclenchement d'une nouvelle contre-attaque ennemie qui vient heurter nos éléments en progression. Les pertes sont lourdes de part et d' autre.

Les contre-attaques se multiplient sur Brunehilde, chaque fois plus violentes. Toutes sont repoussées, grâce à l'énergie et à l'endurance des défenseurs qui, quittant le fusil pour la pelle et la pioche, organisent la position tout en combattant.

Dans la nuit du 2 au 3 juillet, épuisé par ses vaines tentatives, notre résistance opiniâtre et nos retours offensifs vigoureux, l'ennemi se replie, évacuant Assevillers et Flaucourt. A 11h00, le Bois Victor est enlevé, et le chef de bataillon pousse de sa personne jusqu'au carrefour des routes Flaucourt - Belloy et Assevillers – Barleux.

Dans l'après-midi, ordre est donné de ne pas continuer la poursuite et de s'organiser sur la ligne : cheminée de Flaucourt - Point 47 (tranchée Verden). Les réserves du régiment occupent Brunehilde et celles de la brigade s'établissent à Dompierre. Le terrain est organisé, le butin dénombré. Outre de nouveaux prisonniers et un nombreux matériel, il comprend : 2 pièces de 77, 8 de 88, 4 de 120, 4 de 150, 2 de 210, et un mortier russe de calibre supérieur au 210 Nos pertes sont peu élevées.

Mais, pendant la nuit, l'ennemi s'est ressaisi et deux fortes reconnaissances, envoyées, l'une sur Barleux, l'autre sur le Bois de Belloy constatent que ces deux points sont à nouveau tenus par l'ennemi. Le 4 au matin, le régiment reçoit la mission d'enlever le Bois de Belloy, sous la protection d'une puissante concentration d'artillerie masquant Barleux. L'attaque aura lieu le soir, elle sera menée par deux compagnies fraîches.

Toute la journée, le Bois est soumis à un bombardement systématique auquel succède pendant 5 minutes de 16h25 à 16h30 un véritable arrosage par obus de tous calibres. A 16h30, l'artillerie allonge son tir et les compagnies abordent le Bois. A 19h00, le Bois est à nous. De grandes quantités de mitrailleuses et de munitions y sont trouvées. Nous nous installons aux lisières, puis au chemin creux de Barleux, accueillis par une vive fusillade partant des éléments de tranchée situés à l'Ouest de la route Berny - Barleux, fusillade à laquelle nous ripostons énergiquement.

A la nuit tout s'apaise. Des petits postes sont poussés jusqu'au-delà du chemin creux de Barleux. Au cours de la nuit du 4 au 5, le régiment, très fatigué par ces quatre journées de lutte épuisante, est relevé sans incidents.

Nos pertes sont cependant assez sévères et s'élèvent à 14 officiers et 472 hommes hors de combat. Mais près de 9 kilomètres carrés de terrain arrachés à l’ennemi, 700 prisonniers 21 canons, de nombreuses mitrailleuses et un important butin sont la belle récompense de notre effort et apportent au régiment une nouvelle page de gloire.

Cantonné à Chuippes et à Proyart, le régiment reçoit les 11 et 12 juillet un renfort de 1 officier et 157 hommes, aussitôt répartis. Le 17, le régiment passe en réserve de division et de brigade, ayant subi pendant ce court séjour en secteur, de pertes assez fortes, du fait de violents bombardement (83 hommes hors de combat).

Après l'attaque du 20 juillet, pendant laquelle il n'a pas été engagé, le régiment qui a reçu un nouveau renfort de 3 officiers et 300 hommes, remonte en ligne dans le même secteur. Pendant dix jours, au contact d'un ennemi agressif, l'organisation de notre première ligne se poursuit sans trêve, malgré les bombardements violents d'une grosse artillerie allemande très nombreuse.

Le 31 juillet, le régiment est relevé et vient cantonner à Morcourt où il reçoit un renfort de 3 officiers et 219 hommes. Les pertes éprouvées pendant ce séjour en ligne s'élèvent à 141 hommes.

Le 8 août, le régiment est enlevée en camions et transportée en Normandie. Le régiment vient cantonner à Formerie et Valabonnet. Le 14 août, la division est transportée en camions dans la région de Clermont (Oise). Le régiment cantonne à Bresles jusqu'au 26. Il y reçoit, en trois détachements, un renfort de 4 officiers et 118 hommes.

Le 26 la division s'embarque à Clermont et est transportée, par chemin de fer, en Champagne dans la région de Bouy, Vadenay et St-Hilaire-au-Temple. Le Régiment cantonne à Bouy, au camp de la Sablière et au Bois Cochon.

Le 1er septembre, il monte en ligne dans le secteur de Souain (quartier de la Cabane), subdivisions de Victor, Vampires et Sidi-Brahim. Presque sans pertes (21 hommes hors de combat), il tient le secteur jusqu'au 7 octobre, date à laquelle il est relevé, il passe en réserve d'Armée à Suippes et au camp du Piémont.

Du 8 au 20, une période d'instruction de 15 jours familiarise les compagnies avec les nouvelles méthodes de combat. Du 21 au 27 octobre, repos dans la région de Condé- sur-Marne et Aigny, puis le régiment gagne St-Hilaire-au-Temple et s'y embarque à destination de Grandvillers (Oise). Il cantonne jusqu'au 24 novembre à Grez et Cempuis où il continue intensivement son instruction.



L'offensive projetée entre Somme et Oise.

La préparation - La marche sur Saint Quentin (novembre 1916 - mars 1917).


En vue d'une offensive franco-anglaise entre Arras et l'Oise, la Division commence son mouvement le 24 par Maisoncelle, Puits-la-Vallée, et Oursel-Maison, Fournival, le Plesseret et Mesnil-sur-Buttes, Pronleroy et La Neuville-Roy, puis Cuvilly. Le régiment se rend dans la région Sud de Montdidier et vient cantonner le 2 décembre à Godenvillers et Dompierre, d'où il repart le 5.

Le mois de décembre est consacré à une multitude d'opérations de détail tant de la part des Allemands qui cherchent à pénétrer nos intentions et renouvellent leurs coups de main, que de notre part, en vue de mettre au point notre organisation offensive. (Émissions de gaz, opérations de mines dans la région de Beuvraignes).

Le 26 janvier, relevé par des éléments de la Division Marocaine, le régiment vient cantonner à Onvillers. Bus, Camps A, B, et 42. Jusqu'au 3 mars, il organise le terrain en vue de l'offensive. Durant les longues nuits de ce rude hiver, les travaux se poursuivent activement, malgré le froid terrible qui provoque plusieurs cas de congestion.

Épuisée par le formidable effort qu'elle vient de fournir, la Division est retirée du front pour quelques jours et amenée par petites étapes dans la région au Sud de Clermont. Le Régiment, dont les pertes ont été heureusement à peu près nulles (12 blessés) cantonne successivement : le 4 mars à Saint Martin-au-Bois, Montgerain et Vaumont, le 5 à Noroy et Erquinvillers. le 6 à Fay, Agny et Auvillers, du 7 au 13 à Cires-lès-Mello, le Tillet et Cramoisy, puis Foulangues et Maysel, le 14 à Bresles.

Mais les indices d'un repli de l'ennemi au Nord de la Somme, sur la fameuse ligne Hindenburg, signalés depuis le début du mois se sont changés en certitude. Enlevé en camions le 15 mars, le régiment est ramené à Bus. Le 16, il a pour axe de marche : Amy, Avricourt, Beaulieu, Nord de Fréniches, Nord de Flavy-le-Meldeux, Ferme Montalmont, Sud d'Ollezy, Saint-Simon, et doit poursuivre l'ennemi sans lui laisser de répit.

La marche en avant commence le 17 à 5h00. A 6h00, Amy est atteint et la progression continue vers Avricourt, que nos patrouilles signalent à 14h00 comme étant évacué. A 16h00, un bataillon se porte vers le village, accueilli par un feu nourri de mitrailleuses partant de la région de la Ferme Bouvresse et soumis à un tir intense de grosse artillerie. Il progresse néanmoins en utilisant habilement les zones peu battues. Avricourt est dépassé et la marche reprise vers cette Ferme Bouvresse que l'ennemi bombarde violemment à notre approche. A 17h00, notre ligne coupe la route Roye - Noyon et nos avant-postes sont à 200 mètres à l'Ouest de la Ferme.

Le 18, au petit jour, le bataillon reprend la poursuite, en se couvrant par des patrouilles et de fortes reconnaissances. Beaulieu est occupé à 8h00. A 13h00, le Canal du Nord est atteint. A ce moment l'artillerie ennemie, jusque-là peu active, réagit violemment et bombarde avec du 150 les points de passage obligés. La traversée du canal s'effectue en formations diluées. Le Bois du Tunnel est dépassé, puis le Bois de Libermont, sur lequel s'acharne en vain l'artillerie ennemie. A 19h00 nous occupons la lisière Est du Bois de l'Hôpital, rapidement mise en état de défense sous un bombardement qui, réglé par des avions nombreux et actifs, nous cause quelques pertes (3 tués, 21 blessés).

L'ordre est reçu de stationner sur place pour la nuit. Le 19, dès 7h00, nos reconnaissances pénètrent dans le Bois de Bonneuil et s'y installent. La marche vers la Somme continue, seulement contrariée, à partir de la Ferme de Montalmont, par quelques salves de 77 et de 105 qui tuent 4 hommes et en blessent 23. A 18h30, l'obscurité profonde arrête le mouvement en avant. Le vent souffle en tempête, la neige tombe. Le régiment stationne sur ses positions. Sa ligne de grand'garde jalonne la voie ferrée Ham - Flavy-le-Martel. La ligne de résistance est sur la route Ham – Cugny.

Le 20 mars, deux reconnaissances sont poussées vers le Pont de St-Simon. Après avoir surpris un Petit Poste ennemi auquel elles enlèvent une sentinelle, elles progressent jusqu'à 150 mètres du Pont sous un feu violent de mousqueterie et de mitrailleuses.

Deux pièces ennemies sont en position dans le clocher de l'église de St-Simon et gênent sérieusement notre progression. Après un rude effort, une section de mitrailleuses réussit à rejoindre le chef de bataillon et s'établit à l'ancien petit poste ennemi d'où elle contrebat efficacement les mitrailleuses du clocher qui sont bientôt réduites au silence. Les servants tentent en vain de les remettre en batterie mais doivent bientôt abandonner le village, poursuivis par le tir précis de nos mitrailleurs.

Dans l'après-midi le régiment est relevé et va cantonner dans les ruines de Golancourt. Le 21, la division est regroupée. Le régiment vient occuper Flavy-le-Meldeux et Fréniches complètement détruits. Le 23, le régiment est à Campagne, le 24, il arrive à Rollot et y stationne jusqu'au 28.



La bataille de l'Aisne.

L'affaire de Quincy Basse - Bois du Mortier - Vauxaillon - Le plateau de Moisy (avril - mai 1917).


Le régiment gagne par voie de terre la région de Pont-Saint-Maxence où il doit prendre un peu de repos. Le régiment vient cantonner à Moyvillers, Estrées-St-Denis, Élogette et la Ferme du Transloy.

Mais, le 1er avril, l'ordre arrive de faire mouvement vers le Nord-Est. Par Bienville et Vic-sur-Aisne, le régiment vient s'établir au Sud de la Forêt de St-Gobain, à Lœuilly, Sorny et la Ferme de Montécouvé, d'où le 6, il s'installe dans le secteur du Bois de Quincy. Son front s'étend de Landricourt au canal de l'Oise à l'Aisne. Il a un bataillon en ligne au Nord du Canal, un en réserve de brigade à Lœuilly et en réserve de division au Banc de Pierre.

Le 9 avril, la préparation d'artillerie commence, ne provoquant qu'une faible réaction du canon ennemi. Pendant son exécution les travaux d'approche sont activement poussés en vue d'organiser la position que nous améliorons au cours d'une série d'engagements locaux qui nous causent quelques pertes.

L'offensive prévue pour le 12 avril est retardée jusqu'au 16 en raison du mauvais temps. A 6h00, la préparation d'artillerie commence, un peu faible en raison de l'extension du front. A 9h00, les vagues d'assaut du bataillon MATHIEU se portent en avant, bousculent les postes ennemis et pénètrent dans le Bois du Mortier où elles progressent. Mais, accueillies par une violente fusillade et prises d'enfilade par le feu des mitrailleuses en position à l'ouvrage Chardonneret, elles viennent se briser devant la tranchée Brunwald, sur les réseaux intacts où n'existe pas une brèche et que renforcent encore d'épais abattis que l'artillerie n'a pas entamé. Sous un feu d'enfer, nos fractions d'assaut tentent inutilement de s'ouvrir un passage a la cisaille. Leurs efforts reconnus vains, les sections font demi-tour.

Le régiment doit se contenter d'organiser la partie Ouest du Bois du Mortier et de contenir l'ennemi au Nord du Canal de l'Aisne pendant que le reste du Corps Colonial attaque entre Laffaux et Vauxaillon une très forte position qu'il ne peut qu'entamer au prix de pertes très élevées.

L'offensive d'avril ayant échoué dans son ensemble est reprise en mai avec un appui d'artillerie beaucoup plus puissant. Entre temps après avoir amélioré l'organisation du secteur du Bois de Quincy et du Mortier, le régiment est venu prendre position dans son nouveau créneau d'attaque à l'Est de Vauxaillon. Sous un bombardement à peu près incessant, il procède à l'aménagement de son terrain d'action.

Dans la nuit du 28 au 29, nos unités, surprises sur les chantiers par un bombardement d'obus toxiques, doivent traverser toute la nappe gazeuse pour regagner leurs emplacements. De nombreux cas d'intoxication se produisent, nécessitant 52 évacuations, en outre plus de 200 hommes moins gravement atteints, resteront pourtant plusieurs jours dans un état de faiblesse très accentuée. Nos pertes, pendant cette période préparatoire, sont sensibles. Elles s'élèvent, y compris les intoxiqués évacués, à 97 hommes et 3 officiers.

Dans la nuit du 4 au 5 mai, les unités prennent leur dispositif de départ, les groupements d'attaque dans des éléments de places d'armes établis à grande peine dans le vallon de Vauxaillon, à l'Est de la voie ferrée, dans les cavernes 152 et d'Antioche.

Pendant que s'effectue cette mise en place, l'artillerie, puissamment renforcée et qui met un groupe d'appui à la disposition immédiate de chacun des groupements d'attaque, exécute de grosses concentrations par toxiques sur les batteries allemandes.



Vauxaillon.

Combats du 5 au 11 mai sur le plateau de Moisy.


Le 5 mai, à 4h45 les vagues d'assaut bondissent en avant et gravissent avec un aplomb magnifique les pentes abruptes du Plateau de Vauxaillon, impressionnant objectif assigné au régiment. Sans souci des blockhaus de mitrailleuses non détruits qui ouvrent sur eux un feu d'enfer, et des tirs nourris d'artillerie qui les prennent de front et de flanc, Sénégalais et Européens gravissent la muraille que forme le plateau à l'Ouest.

Les sections de soutien viennent combler les vides, creusés par l'entrée en action des organes de défense qui fauchent littéralement certaines fractions, et l' avance se poursuit irrésistible. Le bataillon BONNARD enlève brillamment, la partie de la tranchée de l'Entrepont, comprise dans sa zone d'action. Mais sa droite se heurte, devant la Ferme Moisy, à de puissantes organisations dont la résistance opiniâtre arrête notre progression. A gauche, le bataillon LE BOULANGER, pénètre dans la tranchée de l'Entrepont, la franchit d'un élan et repart. Bien que décimées au passage par la ligne des blockhaus, où elles perdent la presque totalité de leurs cadres, les unités atteignent et dépassent le sommet du Plateau dont les pentes sont couvertes de blessés.

Épuisées, décimées, confondues et sans chefs, les sections sont contraintes de s'arrêter devant le feu meurtrier déclenché sur elles par les mitrailleuses établies à contre-pente sur la lisière du bois, bordant le plateau au Nord et à l'Est. Une poignée de braves, foncent sur l'un de ces blockhaus et s'en emparent, capturant 30 prisonniers et la pièce.

De leur côté, les Sénégalais font 50 prisonniers et enlèvent quatre mitrailleuses, dont ils ont anéanti les servants dans un sanglant corps-à-corps.

La nuit tombe, mais la bataille n'est pas finie. Le terrain conquis s'organise, les liaisons s'établissent vaille que vaille, malgré le feu rasant des mitrailleuses balayant les pentes et le bombardement violent de l'artillerie ennemie qui paraît vouloir appuyer des contre-attaques : nos tirs de contrepréparation empêchent celles-ci de se déclencher. Au petit jour, les tentatives ennemies se renouvellent et l' assaillant subit de lourdes pertes.

Pendant que nos éléments de seconde ligne organisent la position au prix d'un travail ininterrompu et de pertes sanglantes, de nouveaux efforts sont tentés sur les organisations ennemies à l'Ouest de la carrière. Mais ces ouvrages, qui paraissaient être des îlots de résistance isolés, constituent en réalité les antennes du puissant réduit de la Vallée Guerbette contre lequel vient se briser notre élan.

Pendant quatre jours, les contre-attaques ennemies se renouvellent, opiniâtres. Mais ancrées dans la boue. sous les violents orages des 6 et 8 mai, nos unités se maintiennent superbement accrochées au terrain. Malgré le bombardement incessant d'artillerie lourde, malgré les difficultés formidables du ravitaillement, elles conservent stoïquement leur conquête, énergiquement soutenues par nos groupes d'appui.

L' ennemi, à qui nous avons infligé de très lourdes pertes, a laissé entre nos mains un important matériel dont plusieurs mitrailleuses enlevées en de sanglants corps à corps, et 156 prisonniers dont 2 officiers, 1 aspirant et plusieurs sous-officiers. Nous comptons 340 hommes hors de combat dont 6 officiers.



La Haute Saône - Le secteur de Haute Alsace (juin - juillet 1917).


Relevé dans la nuit du 11 au 12 mai, le régiment vient cantonner à Cuisy-en-Almont, Tertiers et Bieuxy, puis, par Montigny, Tannières, Vaudual et Orval. il gagne Villers-Cotterêts où il s'embarque à destination de Lure. Le régiment stationne tout entier dans la région Vesoul - Villersexel.

Un mois de vrai repos, à proximité de l'Alsace reconquise, dans les agréables cantonnements de Gouhenans, Aynans et Villafans a vite fait oublier les durs moments de la Somme et de l'Aisne.

Du 10 au 13 juin, le régiment se rapproche de la frontière qu'il franchit le 14 pour entrer en Alsace. Le 10, il est à Saulnot, Malval, Grange-le-Bourg et Grange-la-Ville. Le 11, à Aibre, Champey, Chavanne, Le Vernoy, Exsuaire et Sermondans. Le 12, à Vezelois, Bavilliers, Botans et Argiesans. Le 13, à Novillard, Brébotte et Vezelois. Le 14, il arrive à Dannemarie, Saint-Léger et Manspach, d'où, le 18, il monte en ligne dans le secteur des bois de Carspach où il occupe le Schonholz, Bahnholz et Lerchenholz.

Le soir même l'ennemi exécute sur nos lignes un coup de main qui échoue piteusement. Ses tentatives se renouvellent plusieurs fois, sans plus de succès, sur nos petits postes et nos organisations avancées. De notre côté, nous tenons l'ennemi en haleine par des embuscades prolongées, des patrouilles actives et agressives et des reconnaissances profondément poussées.

Dans les nuits du 12 au 14 juillet, le régiment est relevé sur les positions. Nos pertes pendant le séjour en secteur n'ont été que de 20 hommes dont la plupart blessés légèrement.



Léonard MOURET fait partie des 20 blessés légers le 14 juillet 1916.



L'usure au Chemin des Dames - Le Poteau d'Ailles.

Hurtenise - Le repli allemand au nord de l'Ailette (2 et 3 novembre).


Le régiment est regroupé aux environs de Belfort où le régiment retrouve ses anciens cantonnements de Novillard et Vézelois. Il est alors transporté par voie ferrée dans la région de Dormans – Château-Thierry.

Une lutte formidable est engagée sur le Chemin des Dames où l'ennemi a réussi à entamer nos lignes avancées. Le 21e est désigné pour mener une opération en dehors de sa zone d'action. Le 28 juillet, il doit participer à une opération sur les positions du Plateau d'Ailles, dont les Allemands ont réussi à s'emparer quelques jours plus tôt, au nord du Chemin des Dames.

Dans la nuit du 28 au 29 juillet les bataillons vont prendre position sur la ligne jalonnée par nos positions les plus avancées. Tranchées et boyaux sont en partie comblés et, dans ce terrain bouleversé et inconnu, les fractions gagnent péniblement leurs emplacements de départ. L'attaque doit avoir lieu par surprise, mais, soit que le tir intensif de l'artillerie dans la soirée du 28 ait créé une atmosphère de nervosité défavorable, soit que son silence presque complet dans la deuxième partie de la nuit ait mis en relief les bruits inhérents à la mise en place des éléments d'infanterie, lorsque, le 29 au petit jour, les vagues bondissent à l'attaque, elles sont, à 30 mètres à peine de notre ligne, de départ, accueillies par un formidable barrage.

La surprise est manquée. Poursuivies par le barrage, harcelées par les mitrailleuses en position à l'ouest de Cassel qui les fauchent de flanc, les unités progressent. Mais, devant la tranchée de Winterberg elles se heurtent à des réseaux hâtivement posés par l'ennemi qui, sous leur protection, résiste désespérément, se couvrant d'un véritable barrage de grenades. Les vagues se brisent sur l'infranchissable obstacle.

Devant Winterberg, les barrages de nos antennes sont poussés jusque contre la tranchée, tandis que, sur la courtine du plateau d'Ailles, nous tentons de progresser vers le nord et l'ouest malgré la résistance acharnée des grenadiers et des mitrailleurs ennemis. Mais la nuit tombe, nos efforts offensifs restent infructueux, les pertes atteignent la moitié de l'effectif. L'attaque se cristallise sur place. Il faut tenir à tout prix sur Weimar et l'ouvrage de Cassel, point d'appui de notre gauche. La position est organisée à cet effet.

Dans la nuit du 30 au 31 juillet, les bataillons sont relevés. Le régiment vient cantonner à Œuilly, fermes du Moulin Rouge et de Bellevue et Maisy. Cette héroïque journée lui a coûté : 65 tués et 248 blessés.

Le régiment doit attaquer sur la crête d'Hurtebise, mais, en raison du mauvais temps qui interdit toute observation aérienne, l'attaque est remise de jour en jour. Il en résulte une fatigue considérable pour les hommes, les bataillons devant se relever à de très courts intervalles, en raison de la nécessité d'avoir constamment en ligne des troupes prêtes à donner l'assaut. Les bombardements continuels entraînent également des pertes assez sérieuses. De plus, les Sénégalais souffrent du froid, les hommes devant, faute de tranchées, se tenir dans des trous d'obus qui sont de véritables bourbiers.

Ainsi remise, l'attaque se déclenche le 15 août à 16h45. Elle a pour objectif la reprise de nos anciennes positions du Monument d'Hurtebise. Elle atteint le Doigt et le Monument d'Hurtebise où les Sénégalais enlèvent deux éléments de tranchée puissamment défendus. Mais, dans la soirée, une série de contre-attaques violentes nous rejettent sur nos positions.

Poursuivant son effort, l'ennemi tente d'entamer nos lignes. Les compagnies de soutien, aussitôt engagées, parviennent à briser ces contre-attaques après une lutte opiniâtre au cours de laquelle nous subissons des pertes sérieuses, surtout parmi les officiers (96 hommes et 5 officiers hors de combat.

Enhardi par l'échec de notre offensive, l'ennemi tente, le 15 août, d'enlever nos positions du saillant des Dames. Il est victorieusement repoussé par nos grenadiers. L'organisation défensive du secteur est alors hâtivement poussée et s'améliore rapidement.

Durant 3 mois, jusque fin octobre, coupée de courts séjours en réserve dans les villages de Revillon, Glennes et Romain ou dans ceux de Maizy, Œuilly et Beaurieux, fréquemment bombardés, ce sera la lutte impitoyable de jour et de nuit sur l'isthme d'Hurtebise. Presque chaque soir l'ennemi, très agressif, renouvellera ses coups de main ou ses attaques.

L'attaque du 15 août sur le Monument et le Doigt d'Hurtebise réussit à enlever à l'ennemi toutes vues sur la région au sud du Chemin des Dames. Le régiment reprend le secteur d'Hurtebise, où la lutte d'usure se poursuit, toujours caractérisée par l'activité de l'ennemi dont l'artillerie et l'aviation ne nous laissent aucun répit et dont l'infanterie renouvelle continuellement ses attaques, chaque fois repoussées par les éléments de première ligne.

Le 12 octobre, les compagnies sénégalaises sont retirées des lignes. Dans la nuit du 20 au 21 octobre, le régiment est surpris au travail par un violent bombardement d'obus toxique (Ypérite) déclenché sur nos lignes et nos arrières. De nombreux cas d'intoxication se produisent, nécessitant une centaine d'évacuations, mais ne provoquant heureusement aucun décès, grâce aux précautions prises. Beaucoup d' officiers et d'hommes, moins sérieusement atteints, quoique souffrant de brûlures assez graves, sont soignés sur place.

Le bombardement toxique se continue le 22 et le 23, entraînant de nouvelles évacuations. Le 23 octobre, l'aviation ayant signalé chez l'ennemi les indices habituels précédant un repli, un coup de main trouve les lignes allemandes fortement occupées. Mais la bataille de la Malmaison, commencée le même jour, va précipiter le mouvement de recul de l'ennemi qui évacue le Chemin des Dames et se replie au nord de l'Ailette les 2 et 3 novembre, harcelé par nos éléments en ligne, malgré la protection que lui offre un épais brouillard et l'action violente de son artillerie sur nos lignes.

Le 3 novembre, nos patrouilles vont reconnaître les passages de l'Ailette, qu'elles trouvent fortement tenus par l'ennemi qui semble avoir arrêté son repli aux limites de la zone marécageuse du nord de la rivière. L'ordre est reçu d'organiser les nouvelles positions et les travaux commencent aussitôt. Le matériel que notre active poursuite a obligé l'ennemi à abandonner est recueilli, les grottes du Dragon et des Saxons sont déblayées. Les organisations principales sont retournées et les tranchées qui, en certains endroits, contenaient près d'un mètre d'eau et de boue, sont asséchées.

Les 8 et 9 novembre, le régiment est relevé. Le formidable effort, soutenu durant ces trois mois d'interminables luttes devant le Chemin des Dames, a épuisé le régiment et lui a coûté, depuis les combats du mois d'août, 249 hommes et 5 officiers tués ou blessés, et 195 hommes et 9 officiers intoxiqués évacués.

Harassés, beaucoup portant encore les stigmates de leur récente intoxication, les hommes trouvent à Revillon les autos qui doivent les emmener à l'arrière. Ils arrivent à Gland, Chartèves et Mont-Saint-Père, cantonnements de repos.

Le régiment se rend par Le Breuil et La Ville-sous-Orbais cantonnements de Vinay, Moussy et Chavot-Courcourt. Un peu d'instruction, beaucoup de repos et quelques fêtes.

Le 16 décembre le régiment gagne par Nanteuil-la-Fosse, Chaumuzy et Pourcy, les cantonnements d'Ormes, Bezannes, Thillois, Pouillon, Fort Saint-Thierry et Camp de Maco, où, jusqu'au 16 janvier, il exécutera toute une série de travaux sur la deuxième position à l'ouest de Reims, entre Bézannes et le Fort SaintThierry.

Le 1er janvier 1918, la température, extrêmement rigoureuse, la neige qui tombe abondamment, le sol profondément congelé et le bombardement ennemi qui nous cause quelques pertes (8 hommes) obligent les hommes et les cadres à un effor considérable.



Léonard MOURET est de nouveau blessé le 26 janvier 1917.



Ramené par Nanteuil-la-Fosse, Chaumuzy, Pourcy et Marfaux, dans ses cantonnements de Vinay, Moussy et Chavot-Courcourt, le régiment retrouve durant la trop courte semaine, le repos qui lui est accordée, tandis que ses chefs vont reconnaître le secteur où il doit prendre position.



La bataille sous Reims - Première période (janvier à mai 1918).


Le 1er mars est sur la Pompelle. Cette zone située au Sud-Est de la ville de Reims, appuie ses positions successives à la partie Est de la Montagne. Son front s'étend des lisières Sud de la ville jusqu'au-delà du C. R. du Prunay et englobe deux anciens ouvrages de la défense de Reims : les forts de Montbré et de la Pompelle.

Depuis janvier 1915 ce dernier est enfermé dans le réseau de nos premières lignes. A cette époque, il a fortement souffert de la lutte de mines, terrible guerre souterraine qui, à ses pieds même, à marqué d'un formidable entonnoir la place où se trouvait la ferme d'Alger.

Au moment de notre prise de secteur, la défense principale de la zone que va occuper le Corps d'Armée, consiste dans le cours de la Vesle, dans les abords marécageux de ses capricieux méandres et dans le canal de la Marne à l'Aisne, ensemble de lignes d'eaux parallèles au front, et d'une façon générale en arrière de la première position. Au Sud de la Vesle existent des éléments de position intermédiaire destinés à battre les débouchés immédiats de la rivière. La deuxième position, entre le fort de Montbré et Verzy ,à hauteur du château de Romont, est à peine ébauchée, elle consiste en quelques tranchées et boyaux en mauvais état, presque sans défense accessoires et sans aucun abri. La troisième position sur le rebord Nord de la Montagne de Reims n'est que piquetée. D'abord réserve de division à Rilly-la-Montagne, Chigny-les-Roses et Montchenot, le régiment relève les 29 et 30 janvier les éléments du 7ème R. I. C. dans les C. R. de l'Allée Noire et de la Pompelle. Le P. C. de Chef de Corps est à Puisieulx. Le front est extrêmement calme. L'activité de l'artillerie ennemie, presque nulle, se limite à quelques harcèlements clairsemés sur la Jouissance, la Pompelle et Sillery. Son infanterie, avec qui nos patrouilles ne peuvent trouver le contact, reste terrée. Seuls ses mitrailleurs se montrent agressifs et gênants par leurs feux de nuit sur nos premières lignes et. leurs tirs indirects sur les passages du canal et sur quelques boyaux prix d'enfilade.

Cette situation est mise à profit pour l'organisation du secteur où les travaux sont activement poussés.

Chacun des secteurs comprendra désormais 3 sous-secteurs : Cormontreuil, Taissy et Puisieux, pour le secteur de Villers-Allerand ; Sillery, l'Écluse et Prunay pour le secteur de Ludes. Chaque sous-secteur sera tenu par un régiment échelonné en profondeur. Le 21ème occupe celui de Puisieulx, compris entre les boyaux Nanta à l'Est et Mondésir à l'Ouest : il a un bataillon en ligne à La Pompelle, un bataillon sur la position intermédiaire, et un bataillon en réserve à Chigny-les-Roses.

Le front ainsi tenu par le Bataillon en ligne est de 1.600 mètres environ, sur une profondeur moyenne d'un kilomètre. Derrière la ligne de surveillance (parallèles de Cambrai et de la Ferme d'Alger), 3 ouvrages : Lisieux, La Pompelle et le Bois Long, constituent la ligne principale de résistance renforcée par une parallèle de doublement (Mlawa et Métro). Enfin la ligne des réduits s'appuie à la voie ferrée et au Canal.

En face de nous l'ennemi dont les premières lignes bordent les pentes de Berru et de Nogentl'Abbesse, tient solidement la ligne des hauteurs au Nord et à l'Est de la ville. Les forts de Brimont, Fresnes, Witry et Nogent-L'Abesse, solides points d'appui de son système défensif dominent nettement nos positions. En outre, de la Vigie de Berru, point culminant du nœud orographique entre Vesle et Suippe, qui nous est directement opposé, ses observateurs ont des vues étendues jusqu'à la crête militaire de la Montagne de Reims, appui puissant et suprême de toute notre organisation.

C'est sur cette position, dont de judicieuses dispositions de détails (accès aux places d'armes, compartimentage du terrain, flanquements de mitrailleuses) ont heureusement renforcé la valeur défensive, que vont se renouveler de mars à juillet, de multiples et opiniâtres attaques en force.

Mais malgré l'appui d'une artillerie formidable. malgré l'emploi répété d'émissions de gaz par projectors et la proportion inusitée de bombardements toxiques d'une extrême violence, ces assauts pourtant donnés par d'importants contingents de troupes sélectionnées viendront chaque fois se briser contre l'indomptable résistance et l'indéfectible ténacité de nos éléments en ligne.

Dans la nuit du 28 février au 1er mars, l'artillerie ennemie révèle brusquement sa puissance par un bombardement profond d'une extrême violence dont la grande extension latérale ne permet pas, tout d'abord, de localiser les intentions offensives. Mais, dans la matinée du 1er mars, les tirs se précisent. L'encagement complet du Fort et des ouvrages limitrophes, la destruction de nos réseaux en avant du saillant d'Alger et les tentatives de neutralisation de nos groupes d'appui direct, indiquent nettement quel va être le point d'attaque.

A partir de midi, malgré le déclenchement de nos tirs, le canon ennemi exécute un véritable pilonnage de la position qui se trouve bientôt complètement isolée. Les liaisons téléphoniques sont coupées et les liaisons optiques rendues impossibles par la poussière et la fumée. Les observatoires du Fort sont détruits. Tous les coureurs qui ont tenté de franchir le barrage sont tués.

A 17h40, le tir de destruction sur nos réseaux se transforme en barrage roulant et la première vague d'attaque ennemie débouche. Notre barrage, immédiatement déclenché et fortement appuyé par le tir des mitrailleuses du C. R., de la position intermédiaire et des C. R. voisins l'oblige à refluer, sauf sur la droite où elle réussit à aborder la tranchée d'Avignon, dont une contre-attaque immédiate de la compagnie SERGENT la rejette aussitôt.

Cette première tentative, grosse reconnaissance destinée à tâter les positions et à en chercher le point faible, est bientôt suivie d'une seconde que précède un tir de ratissage, effectué sans doute à la demande d'un des avions, qui, de très bas, survolent nos lignes.

Cette fois, c'est l'attaque en force, donnée par 2 bataillons de Strosstruppen renforcés d'une compagnie de pionniers. Sa mission est d'enlever le Fort de la Pompelle et de s'y maintenir à tout prix. Il est 20h00, le jour tombe, assombri par une violente bourrasque de neige. Devant le Fort les défenseurs, cramponnés aux bastions, contiennent énergiquement l'ennemi qui débouche en masse, précédé de lance-flammes.

A gauche de la Pompelle, l'ennemi se heurte aux solides défenses de l'ouvrage de Lisieux, devant lequel il est immobilisé par les feux croisés de nos mitrailleuses. Entre cet ouvrage et le Fort, il réussit à s'infiltrer jusqu'à l'ouvrage 12 où il est arrêté par le groupe de combat mitrailleur, établi derrière un barrage de fortune et qui tiendra jusqu'à l'arrivée des renforts.

Mais à droite, la situation est plus critique. L'ennemi qui a tenté son principal effort de ce côté, envahit la tranchée d'Avignon et celle-ci doit être abandonnée après une lutte acharnée.

L'ennemi progresse. Arrêté au Bois Long contre lequel il pousse de vigoureuses attaques, sans pouvoir en entamer les A 20h30, le P. C. Métro tombe aux mains de l'ennemi, malgré la résistance désespérée des fractions de la 7ème compagnie, qui le défendent et se font tuer sur place.

Le Fort est complètement encerclé. Le tir de l'artillerie ennemie, qui s'est déplacé vers le Sud, martèle maintenant la voie ferrée, les bords du Canal, ses points de passage et ses débouchés, les ponts sur la Vesle et les passerelles du Marais. Le bataillon de BAZELAIRE, alerté dès 15h00 sur la position intermédiaire, reçoit l'ordre d'établir des petits postes au Nord du Canal et de se tenir prêt à la contre-attaque.

Malgré la nuit, l'ennemi continue son effort, obligeant la 5ème compagnie à évacuer le Bois Long. Nos fractions se replient en luttant pied à pied dans les boyaux de Sillery et de Nanta où elles établissent de solides barrages qui arrêtent la progression des colonnes d'attaque. Cependant le Fort résiste victorieusement aux furieux assauts de l'adversaire qui s'attaque vainement pour y pénétrer aux issues Nord et Sud non démolies. Grâce à ses flammenwerfers, il réussit à occuper le fossé nord.

Vers minuit, une contre-attaque le Bois Long rejette l'ennemi sur la tranchée d'Avignon. Nos groupes d'appui et nos mitrailleuses effectuent, sur le saillant d'Alger et les positions envahies par l'ennemi, des tirs d'interdiction et de harcèlement violents et efficaces.

Le 2 mars, à 5h00, le Fort tient toujours. Les contre attaques se déclenchent, vivement menées à la grenade. Épuisé par la résistance acharnée qu'il a rencontré et très éprouvé vers la fin de la nuit par le tir de notre artillerie, l'ennemi résiste faiblement à notre poussée. Il lâche les positions au Sud du Fort avec qui la liaison est aussitôt rétablie, et qu'on ravitaille en munitions.

Poursuivis et décimés par les tirs nourris des mitrailleuses qui croisent leurs feux directs et indirects sur le « no man's land » au-delà du saillant d'Alger, les Bataillons de Stosstruppen regagnent péniblement leurs lignes de départ au prix de nouvelles pertes.

A 9h00, la situation est entièrement rétablie et l'occupation du C. R. normalement reprise. Les effets du bombardement sur le Fort et ses alentours montrent la puissance de l'attaque si brillamment repoussée et qui semble avoir été donnée dans le double but de nous rejeter en arrière du Canal (conséquence à peu près obligée de la perte de la Pompelle) et de sonder la puissance de nos organisations défensives autour de Reims, dont la conquête fait, dès maintenant, partie du plan d'offensive ennemie.

Dès la nuit suivante la remise en état du secteur est commencée. Elle demandera un gros effort, car les réseaux ont disparu. Les tranchées et les boyaux sont nivelés et le Fort lui-même n'est plus qu'une informe carapace crayeuse dont plusieurs projectiles de gros calibre (210) ont, sans éclater heureusement, traversé les voûtes.

Nos pertes sont de 88 tués, blessés ou disparus.

Pour se venger de son échec, l'ennemi déclenche le 5 mars à 23h00 une batterie de projectors établie dans le Bois en V et dont les projectiles, de gros minen à gaz, surprennent les hommes occupés aux travaux de réfection de la position. Malgré la mise en œuvre immédiate des mesures de protection individuelle et collective, des cas d'intoxication se produisent, causant 27 décès et nécessitant des évacuations (1 officier et 72 hommes).

La remise en état du secteur, activement poursuivie, s'achève rapidement malgré plusieurs bombardements à gaz, qui, à partir du 21 mars, s'attaquent en outre à notre 2ème position et à nos batteries.





Le décès de Léonard MOURET est constaté le 6 mars 1918 à Taissy, Fort de la Pompelle, (Marne).

Signaleur très courageux, très dévoué, le 18 août 1917 il a donné un bel exemple de courage et de sang froid en assurant de façon parfaite le service de renseignement malgré la violence du bombardement.

Il est décoré de la Croix de Guerre.